Dallas, l’autre Amérique


Si les seniors sont des adeptes du classique « New York – Miami – San Francisco », ils négligent trop souvent des états intermédiaires pourtant riches d’une histoire née avec la création des États-Unis. Le Texas, et plus particulièrement Dallas, fait partie de ces régions que l’on se plait à découvrir avec à la clé des surprises géographiques et artistiques surprenantes.

Pour le monde entier, Dallas reste associé à l’assassinat du Président Kennedy. Une tache indélébile dans l’histoire des USA qui conduit des centaines de visiteurs sur les lieux mêmes de l’attentat. Mais Dallas, souvent considéré comme la capitale économique d’un état hâtivement qualifié de « primaire » dans les années 60 par l’élite américaine a su faire sa révolution tranquille et devenir un haut lieu culturel et artistique.

Pour comprendre Dallas, il faut comprendre le Texas. Dans cet état, souvent qualifié d’hyper conservateur, ce sont tous les Etats Unis qui pourraient être résumés en quelques étapes. De Corpus Christi, au bord de l’Atlantique à Wacco (au centre) via San Antonio (proche de la frontière mexicaine), le Texas offre une étonnante diversité géographique faite de plaines, de montagnes  et de plages.

Fort Alamo à San Antonio

Son histoire aussi est parsemée de dates, de lieux et d’aventures héroïques comme Fort Alamo à San Antonio, qu’habite encore l’âme de David Crockett. Plus loin dans le temps on se rappellera cette présence française portée par René Robert Cavelier de la Salle qui rêvait d’une petite France « riche d’une culture d’un monde nouveau sur un continent à explorer ». 

Mais le Texas ce sont d’abord deux chiffres : 1,25 fois plus grand que la France pour à peine 30 millions d’habitant. Dans cet état, le plus grand des Etats Unis après l’Alaska, tout est démesure. Les ranchs d’abord, qui peuvent couvrir quelques milliers d’hectares et qui demandent des jours à cheval pour en faire le tour.

Le pétrole, ensuite, qui coule à flot et assure la richesse de ses exploitants. La musique, enfin, née des cow boys nostalgiques, harmonica dans la poche revolver d’un jean à peine né, aux chapeaux à large bords et aux vestes de cuir usées par les selles. « Tout le Texas est dans les contrastes « explique Betty Cook, journaliste au Dallas Morning News « C’est parce que nous sommes les garants des origines de notre pays que nous passons pour des ploucs peu évolués et incapables d’être dans leur époque ».  Et d’un clin d’œil de préciser : « laissons-les croire à ces balivernes, les texans sont bien différents ».

Se promener dans les rues de Dallas, il est vrai peu nombreuses ouvertes à la flânerie, donne une idée de ce que peut-être le Texas profond. Quelques limousines ornées de cornes de bœuf et des chapeaux à la JR que complète des santiags noirs. Pas de doute, l’Etat a conservé l’une des images qui lui collent à la peau : le pays des ranchs, des cowboys et des long horns. Lyndon Johnson, illustre texan comme Georges Bush, père et fils, disait toujours, le sourire aux lèvres « sous leurs airs parfois simplistes, les texans sont de redoutables hommes d’affaires » et de conclure « faire du business avec eux, n’est pas aussi facile que le pensent les new yorkais ».

Un résumé parfait de l’état d’esprit local. Ici on est très vite ami mais cela ne veut pas dire que tout est acquis. Au contraire, les texans sont méfiants voire sceptiques face aux étrangers. « Pire encore, ils sont chauvins » explique John, un texan bon teint qui précise en souriant « mais le plus souvent au moment de manger ». Le ton est donné. D’Amadeus à American Airlines, les grandes entreprises locales sont très largement ouvertes sur le monde. Il faut dire que pour beaucoup, Dallas est au centre du monde.

Des documents inédits sont présentés au Musée Kennedy

La devise de la ville « Live large, think big » résume l’état d’esprit de la cité. Avec un peu plus de 7 millions d’habitants dans la communauté urbaine, Dallas, qui n’est pas la capitale du Texas (c’est Austin) capte plus de 50% de l’activité économique. Et le pire, c’est que vu de l’extérieur, la cité semble sans âme. La première approche débute toujours par un tour en voiture. Inexorablement c’est vers le lieu même de l’assassinat de Kennedy que tout voyageur se porte.

Rien de bien extraordinaire dans cette bâtisse de brique rouge. C’est là que l’on s’arrête devant la fenêtre où était posté Lee Harvey Oswald quand il tira sur le Président. Ici, on ne veut pas remuer la boue et polémiquer avec le visiteur. On se borne à répéter l’histoire officielle !  Six étages repensés comme un musée à la gloire du président défunt. Les stigmates de l’attentat sont toujours présents et conduisent jusqu’au mémorial. Un vaste cube de marbre blanc posé là comme une excuse.

Une sorte de « pardon » géant, sans âme et banal. Un tour à la boutique donne le ton de la passion des américains pour ce drame. Livres, films, cartes postales… Rien ne manque aux historiens en herbe pas même les épinglettes des élections qui virent Kennedy devenir le 20 janvier 1961 le 35ème Président des États Unis.

Dallas n’est pas seulement une ville où l’on passe. C’est à la fois le point de départ d’une découverte artistique insoupçonnée.

Un état très artistique

Jean Dubuffet au Nasher
Jean Dubuffet au Nasher Museum

L’état est l’un des plus riches en matière de musées et de centres culturels. Pétrole oblige, les donations sont importantes, de bon goût et remarquablement mise en valeur. C’est au Nasher Museum à Dallas qu’il faut débuter le circuit culturel de l’Etat. 300 œuvres d’artistes comme Calder, Rodin, Picasso, de Kooning sont présentés dans ce musée entièrement voué à l’art sculptural. Ne manquez pas la visite des jardins qui consacrent des œuvres monumentales et originales tout en privilégiant la créativité.

Autre site à voir : le Museum of Art qui demande une bonne journée à lui seul. Implantés au centre de la ville, les bâtiments centraux, au rose étonnant, abritent plus de deux siècles d’histoire de l’art. Des collections très intelligemment mises en scène pour permettre à chacun d’en comprendre l’origine et sa place dans le fil de l’histoire. Créé en 1903, il abrite plus de 23 000 œuvres couvrant une période de 5000 ans. Éblouissant.

A voir absolument

Le Geo Deck – Reunion Tower
300 Reunion Blvd E, Dallas, TX 75207

C’est le point le plus haut de la ville, une tour qui permet une vision à 360° de la ville. On y découvre les différents quartiers et un enchevêtrement d’autoroutes assez spectaculaires. C’est le soir, une fois la nuit tombée, qu’il faut visiter les lieux : la ville clignote, scintille et donne une idée très exacte de la surface qu’elle recouvre. Au pied de la tour, la très traditionnelle boutique regroupe tout ce qui se fait en artisanat local et objet touristique : des cornes aux pointes spectaculaires en passant par les boules de neige les plus kitsch.

The Sixth Floor Museum at Dealey Plaza
411 Elm St., Dallas, TX 75202

Peut-on échapper au Musée Kennedy ? Certainement pas d’autant que la demande pour s’y arrêter est forte. Le spectacle est dans la bibliothèque et dans la rue. Deux crois au sol résument la tragédie. Les deux impacts de balle tirées sur le convoi présidentiel. Le musée résume la carrière du président assassiné et analyse les faits. Ceux-là mêmes sans cesse remis en cause par les historiens. Notez une petite partie consacrée aux différentes hypothèses nés dans les années 70. Lee Oswald n’était pas seul ? A vous de juger.

Dallas Farmer Market
920 S Harwood St, Dallas, TX 75201,

Connu pour sa variété de produits, quasiment tous issus des fermes locales, ce marché est aussi un résumé de l’artisanat local qui mélange le savoir faire de jeunes artistes mais aussi des créations indiennes plus traditionnelles.

Fair Park
Plus d’un kilomètre carré de verdure quasiment en centre ville… Voila l’un des poumons verts les plus appréciés par les habitants. Mais au delà, le Fair Park est à la fois un centre culturel (pas moins de 9 musées), un aquarium réputé et un stade utilisé en centre de spectacle. Y passer une soirée permet de voir vivre les texans et de s’imprégner d’un art de vivre que peu d’états du sud propose.

Dallas en trois heures

Shopping at NorthPark Center
8687 North Central Expressway, Dallas, TX 75225

Peut-on raisonnablement dire que l’on découvre un centre commercial ? Et pourtant, ici c’est le mélange réussi d’une exposition d’œuvres d’art et de magasins chics et prestigieux. Sculptures, peintures, collages sont ainsi proposés aux visiteurs entre les boutiques de luxe. Notons qu’un guide spécialisé, uniquement en anglais et en espagnol, propose une découverte insolite des lieux au travers d’une présentation des relations commerciales entre les artistes et les grandes marques européennes ou américaines.

Dallas Museum of Art
1717 N Harwood St – Dallas

Longtemps vexé d’être considéré comme une population inculte, ce qui est loin de la réalité, la ville a créé d’étonnants musées dont le plus prestigieux reste certainement celui-là. On y trouve entre autres des œuvres d’Édouard Hopper, de Rodin ou de Frederic Church. L’architecture même du musée invite à la flânerie à la découverte d’autant que des visites guidées, parfois thématiques et, conduisent le visiteur à l’intérieur même de l’histoire des œuvres présentées.

Nasher Sculpture Center
En trois heures, on peut hésiter entre ce musée et le Kimbell Art muséum où l’on pourra découvrir des Cézanne, El Greco, Caravaggio ou Michel-Ange. Si vous avez le temps, faites aussi le Nasher qui offre un mélange particulièrement réussi d’œuvres modernes et plus classiques qui conduisent sur les pas de Rodin, Calder, Miro, serra ou Kooning.

Dallas en une après midi

C’est à Forth Worth , à quelques kilomètres de Dallas, que se vivent encore les saloons, les duels et bien évidemment les migrations des Long Horns, « longues cornes », ces vaches aux pointes acérées qui peuvent atteindre 1 mètre de long. Tous les jours, à 16 heures, dans le Stockyards Historic District est reconstitué la rentrée des troupeaux. Des figurants et de véritables cows-boys réunissent les bêtes pour les conduire à la grande halle centrale, là où se déroulera le rodéo du soir. Une habitude prise en 1865 pour permettre aux fermiers de lutter contre les bandits de grands chemins, voleurs de bétails. C’est vers 20 heures que se retrouvent les amateurs de sensations fortes.

Rendez-vous, pour un rodéo. Après la présentation du drapeau, à cheval, c’est l’hymne américain qui retentit dans un silence total. Le public, la main sur le cœur, se fige pendant quelques minutes. Inutile de sourire ou de faire le malin, c’est mal vu. Autant jouer le jeu et respecter les coutumes locales. Contrairement aux idées reçues, hommes et femmes participent aux rodéos. Enfants même avec une épreuve de « ficelage » de veau.

Enfin, pour compléter la soirée, un tour au Billy Bob’s (2520 Rodeo Plaza à Fort Worth), le plus grand centre country au monde. Pas moins de 8 scènes différentes, quelques 20 bars et plus de 10 000 personnes le week-end pour un « square danse » endiablé. A noter que tous les dimanches des cours de danse country sont proposés pour moins de 10 dollars.

National Cowgirl Museum and Hall of Fame
1720 Gendy Street, Fort Worth

On parle toujours des cow-boys mais rarement de la Cow Girl qui est à l’honneur dans ce lieu qui met en avant toutes les femmes qui ont fait l’ouest américain et marqué l’histoire du Texas. Situé à Fort Worth, le Hall of Fame présente une collection de photos rares et une bibliothèque unique au monde sur la vie quotidienne à la fin du 19ème siècle.

The Best Hat Store
2739 N Main St – Fort Worth, Texas – 817.625.6650

Comment devenir un parfait cow-boy, ou un local, en deux heures ? La réponse se trouve dans ce magasin qui propose l’indispensable pour devenir un vrai texan : le chapeau. Pas moins de 5000 références et un ensemble de service qui va de la réparation à la création sur mesure.

Se distraire en fin de journée

Poor David’s Pub
1313 Botham Jean Blvd – 75215 Dallas

C’est le lieu préféré des vrais texans. Toutes les légendes de la musique country se sont produits dans ce pub à l’ambiance rétro et à la façade qui ne paye pas de mine. . De Ray Wylie Hubbard à Kelly Willis, Guy Forsyth ou Steve Earl, toutes les gloires locales sont à l’affiche de ce pub qui met en valeur les traditions texanes. Le samedi soir, tapis de cacahuètes assurés et ambiance cow boy pour accueillir les visiteurs. On y crie, on y chante et bien sur on y boit de l’excellente bière locale.