Une « Madeleine » au Canada

© G. Theriault

Certains rêvent de Zanzibar ou de Shanghai et accrochent des images, souvent trop idylliques, à ces noms « magiques ». D’autres rêvent de phares, de vagues, de vent, d’océan et d’accent québécois à couper au couteau, ce qui les conduit tout naturellement vers les îles de la Madeleine. Mars comme avril sont les deux mois traditionnels pour préparer son voyage et réserver sa traversée.

On se doute bien, au seul prononcé du nom, que les îles de la Madeleine sonnent un peu canadiennes. L’Archipel, au bout du Saint-Laurent, comme la dernière garde avant l’Atlantique, comprend une douzaine d’îles, dont six sont reliées entre elles par d’étroites dunes de sable.

Ici vivent depuis des siècles des hommes et des femmes qui, tous les hivers, attendent la banquise sur des îlets balayés par les vents. A certains endroits, la largeur des rochers ne dépasse pas la largeur de la route qui, depuis les années 70 seulement, relie les îles entre elles. Toute leur féerie est là ! Dans le spectacle d’une nature préservée et isolée. Du Nord au Sud, voici l’île de la Grande Entrée, la Grosse Île, l’île aux Loups, l’île du Havre aux Maisons, l’île du Cap aux Meules et l’île du Havre Aubert.

Offrez vous une petite « madeleine »

© Claude Brochu – Phare situé sur la côte sud de
l’Île du Havre Aubert

Deux autres îles de superficie importante s’y ajoutent : l’île d’Entrée, habitée et située à 10 km à l’est de Havre Aubert, et l’île Brion, inhabitée et située à 16 km au nord de Grosse Île. D’autres petites îles et îlots complètent le tableau : le Rocher-aux-Oiseaux, l’île aux Loups-marins, l’île Paquet, le rocher du Corps-Mort et quelques autres encore. On ne peut visiter ces îles, et les comprendre, sans s’intéresser à leur histoire. Les Indiens Micmacs nommaient poétiquement l’archipel «Menagoesenog», mot signifiant «îles balayées par la vague». Bien avant la venue des Européens, ils les fréquentaient déjà, en quête de poissons, de phoques et de vaches marines.

Le 25 juin 1534 Jacques Cartier, dans son journal de bord, baptise à son tour les Îles «les Araynes», du latin arena, c’est-à-dire sable. Il aborde d’abord l’Ile aux Oiseaux, qu’il nomme alors «Isle aux Margeaux» à cause des nombreux volatiles de ce nom qui s’y trouvent, puis l’Île Brion. En 1755, le destin des Acadiens prend une tournure tragique. C’est le «Grand Dérangement» : la population acadienne, présente sur l’île de la Nouvelle Écosse, en face, et au Nouveau Brunswick, est déportée à travers le continent. Quelques familles échappent à cette déportation et débarquent aux îles de la Madeleine. Les Madelinots gardent un souvenir vivace de cette époque, qui explique peut-être leur sens inné de l’accueil et leur envie de rencontres.

Une terre de découverte

Ce qui surprend aux îles, c’est le vent quasi permanent qui accompagne la vie de tous les jours. Un vent léger qui peut devenir puissant au point de faire de ces lieux le paradis des cerfs-volants et de tous les sports marins qui utilisent la puissance d’Éole.

Autre surprise, le vert permanent. Celui qui recouvre les dunes et les collines, qui accompagne les modestes forêts de l’île et donne de l’éclat aux phares qu’il entoure. Enfin, de ce mélange sortent d’innombrables taches de couleur, taches de vie que sont les maisons madeliniennes. Du rose clair au bleu foncé. Du ocre au rouge puissant. Comme si la gaîté de la vie prenait le pas sur la rudesse du climat. Enfin, les phares, au-dessus de falaises sans fin, seules lumières dans la nuit, colorés et repeints comme des œuvres d’art. Ce sont eux qui rappellent aux voyageurs que nous sommes sur des îles lointaines, perdues en mer face à un Océan Atlantique immense et souvent agité.

© Tourisme des Iles de la Madeleine

Sur ces terres de pêcheurs de homards, la première des activités pour les voyageurs est tout simplement balnéaire. Un peu au sens « baignade » du mot, mais les eaux sont assez froides (entre 15 et 18°), c’est donc surtout au sens kayak, voile ou pourquoi pas, pêche du homard. Pour sentir les îles : promenade à pied sur le sentier du Barachois. 5 kilomètres entre mer et marais. Puis dans la foulée, un autre circuit, celui de la plage de la dune du sud. Vingt-deux kilomètres de sable. Une plage à l’infini, recouverte de coquillages, de moules échouées (à la carapace dure et blanchie par le sel) et ponctuée d’innombrables bois flottés, récupérés et utilisés comme matériel de décoration.

Une première rencontre avec la nature que complètera le sentier de la butte-au-vent : ce point le plus élevé de l’île donne une vision assez complète des paysages. Nous voilà Madelinots.

Le charme à l’état pur

Dans un environnement climatique un peu dur, le sens de l’accueil n’est pas un vain mot. Depuis deux ans, l’hôtellerie de luxe se développe au Québec et les Maritimes (dont font partie les îles) n’échappent pas à un tourisme de luxe, mélange d’hébergements de qualité et de nature à l’état sauvage.

© Tourisme de la Madeleine

Première bonne adresse : le Domaine du Vieux couvent (292, route 199 Havre-aux-Maisons, G4T 5A4 – Québec, Canada – Téléphone : 418 969-2233). Une ancienne école de jeunes filles transformée en hôtel en 1966. Un site éblouissant par la qualité des matériaux anciens utilisés (bois, pierres…) et la volonté des propriétaires de laisser l’histoire envahir toutes les chambres. Des années de travaux pour 10 chambres et un restaurant gastronomique.

Dix chambres aux noms évocateurs qui rappellent le passé des lieux :  la mère supérieure (qui ouvre sur la mer) aux volets à l’ancienne et au parquet craquant à souhait, l’œil de bœuf (au dernier étage) avec une mansarde qui donne au voyageur l’envie d’être cocooné, le vallon de l’acadien, beau coucher… Chacune d’entre elles est différente, unique à souhait. Les propriétaires et fondateurs ont fait de cet hôtel l’un des plus beaux de l’île et sans doute de cette province des Maritimes. A noter l’excellent restaurant de moules (mais aussi de requin, de morue, de pétoncles…) qui propose une bière « Domaine du vieux couvent » brassée sur l’île. Prenez le temps d’un petit déjeuner face à la mer et allez vous promener sur la plage toute proche. Un régal.

La maison des falaises

© Tourisme des Iles de la Madeleine

Pour comprendre la vie sur ces iles, il faut se rappeler cette phrase chère aux madelinots : « On peut enlever un gars des îles, mais on ne peut pas enlever les îles d’un gars ». Bienvenue à la maison des falaises, (162 Chemin Des Echoueries, Havre-aux-Maisons) en bord de mer.  Tout a été choisi et construit avec charme. Une salle de douche en pierre claire égayée d’objets qui rappellent la mer. Et pour couronner le tout, un spa, face à l’Atlantique. Un centre de soins réservé à ses clients. Une halte incontournable. A faire : le petit déjeuner gastronomique surprise, véritable découverte de la production culinaire locale.

Quatre jours sur place, c’est le minimum pour découvrir les îles. En voiture ou scooter de location si la météo le permet, elles sont les derniers repères de ce Québec authentique fait de traditions et de modernisme. Le dernier carré d’un archipel où l’écologie existe depuis des siècles.

Marcel Lévy

Les îles en bateau
Le périple était assez inhabituel pour être préparé suffisamment à l’avance mais atteindre les îles en bateau depuis Montréal restera un must dans les mémoires. Le Vacancier, voilà le nom du bateau, un navire de 12 000 tonnes, 8 ponts, 126 mètres de long et 220 cabines qui a terminé son travail. Aujourd’hui, c’est de l’île du Prince Edward que l’on peut atteindre les îles de la Madeleine. Départ de Souris vers Cap aux Meules. Attention, les traversées pour l’été se remplissent vite !  Notez que les plus classiques prendront l’avions à Montréal pour atteindre les îles.

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