Retour des supersoniques, carburant innovant, avions de 1.000 passagers, avions sans pilote : à quoi ressemblera le transport aérien dans les prochaines années ? Et quel bénéfice pour les passagers ?
Près de 5 milliards de personnes devraient transiter dans les aéroports du monde cette année : un record absolu, dépassant largement les chiffres de 2019, avant la crise du Covid. Certes, ces bonnes performances sont largement portées par l’explosion du marché intérieur en Chine. Il n’en reste pas moins que la croissance du secteur est spectaculaire, au point que les compagnies aériennes se trouvent confrontées à… un manque d’appareils. Ni Airbus ni Boeing ne parviennent à faire face à la demande. Actuellement, 22.880 appareils assurent en moyenne 100.000 vols par jour et il en faudrait 46.000 en 2040.
C’est dans ce contexte que les constructeurs « planchent » sur de nouveaux concepts. Boeing, par exemple, travaille en ce moment sur son futur 797 dont les coûts de développement devraient avoisiner les 50 milliards de dollars… Un pari risqué pour la firme de Seattle, qui doit faire oublier les incidents répétés survenus ces derniers mois sur ses 737 MAX, 787 et 777. Certains, même, estiment qu’il faudra dans l’avenir des avions emportant 1.000 passagers. Mais jusqu’ici, aucun moteur n’est capable de propulser un tel engin, dont l’exploitation exigerait la construction de nouveaux terminaux, l’allongement des pistes, etc.
Des avions sans pilote
En attendant, et sans surprise, l’intelligence artificielle a conquis le transport aérien. KLM, par exemple, l’utilise pour lutter contre le gaspillage alimentaire. Mais Airbus travaille sur un avion intégrant des éléments d’intelligence artificielle et les Etats-Unis et le Japon ont conclu un accord pour développer conjointement un avion sans pilote, exploité par l’intelligence artificielle. Une application militaire, d’abord, mais qui pourrait être étendue à des avions civils.
Et puis il y a les drones. La technologie leur permet désormais d’opérer au-delà de la portée visuelle du pilote, ouvrant ainsi de nouvelles possibilités pour l’aviation sans pilote. La réglementation reste cependant, pour l’heure, le principal obstacle à leur développement : plus de 1200 demandes de dérogation ont été déposées par des opérateurs de drones dans le monde, et refusées à 99 % d’entre eux…
C’est dans le secteur de la mobilité urbaine que les drones dessinent un avenir plus immédiat, avec par exemple les projets de robots taxi d’Airbus. Pour sa part, l’entreprise américaine Stratolaunch a enregistré le succès du premier vol d’essai motorisé d’un nouveau vaisseau sans pilote destiné à la recherche hypersonique, soit à, à des vitesses d’au moins Mach 5, cinq fois la vitesse du son.
Le retour du supersonique
En à peine trois ans, la société Boom Supersonic, basée à Denver, a développé son premier jet supersonique. Le vol réussi de son prototype, le XB-1 est une étape importante vers la commercialisation de l’avion Overture, plus gros et le retour des voyages supersoniques civils après le retrait du Concorde il y a vingt ans.
Les compagnies y croient : 130 commandes et précommandes ont déjà été passées auprès de grandes compagnies aériennes comme American Airlines, United Airlines et Japan Airlines. L’Overture devrait pouvoir transporter 64 à 80 personnes à Mach 1,7, soit environ deux fois plus vite que les avions actuels.
Il ne lui faudrait que moins de quatre heures pour relier Londres à New York huit heures pour relier Los Angeles à Sydney… En toute sécurité*, ce qui plaira aux voyageurs seniors, qui aiment de moins en moins passer trop de temps dans un avion. L’Overture espère obtenir son autorisation de vol dans deux ans.
La priorité : le carburant
Entretemps, constructeurs et compagnies aériennes focalisent leurs recherches sur les nouveaux carburants. La nouvelle norme européenne fixe à 2 %, dès 2025, le niveau de ces carburants dans les réservoirs des avions, un seuil qui devrait être relevé progressivement, pour atteindre 70 % en 2050. Un Airbus a volé à l’huile de vidange et des avions volent déjà, au moins en partie, au biocarburant, élaboré à partir de déchets végétaux. Mais la source d’approvisionnement pourrait être… les excréments humains ! Des tests en laboratoire ont en tous cas débouché sur des résultats positifs. Une usine transformant les déchets humains en carburant durable pour l’aérien (SAF) est en tous cas en construction dans le comté d’Essex, dans le sud-est du Royaume-Uni, qui prévoit de produire 525 000 tonnes de SAF sur 15 ans.
Mais c’est sans doute l’hydrogène sur lequel reposent les recherches les plus sérieuses. Aujourd’hui relativement facile à produire, l’hydrogène ne rejette aucune substance dans l’atmosphère, si ce n’est de la vapeur d’eau. Là aussi, les compagnies y croient, comme American Airlines qui signé un accord d’achat conditionnel pour 100 moteurs électriques à hydrogène destinés à alimenter des avions à réaction régionaux. Et, comme pour le secteur automobile, les moteurs électriques et hybrides et la pile à combustible à hydrogène sont d’autres domaines explorés par les chercheurs pour un transport aérien décarbonné.
Plus de confort
Et le passager dans tout ça ? Car si toutes ces recherches profiteront avant tout aux compagnies aériennes — et peut-être aussi à la planète — c’est l’accès aux avions qui reste déterminant pour les voyageurs seniors, y compris à l’intérieur : le président Biden l’a bien compris, qui a récemment contraint les constructeurs aériens à faciliter le déplacement des passagers en fauteuil roulant.
Le confort en vol, aussi, tout simplement : de plus en plus de compagnies proposent des formules « Premium », voire des vols « full business » à des prix accessibles. Une option de plus dans l’achat d’un billet, qui devient un vrai casse-tête : les voyageurs visiteraient aujourd’hui jusqu’à 277 pages web avant de réserver un trajet ou des vacances, contre « seulement » 38 il y a dix ans…
Claude Boumal
Ancien élève du CFJ, licencié en Communications de l’Université Libre de Bruxelles, Claude Boumal a pratiqué toutes les formes de journalisme, de la presse quotidienne à l’hebdomadaire et à la radio en passant par l’Agence Centrale de Presse, dont il fut longtemps le correspondant en Belgique, en même temps que pour Tour Hebdo. Spécialiste en nouvelles technologies et passionné de marketing, il a contribué au lancement de plusieurs médias du tourisme et a fondé la lettre d’information Voyage & technologies, qu’il a éditée pendant dix ans.
Du même auteur : survivre au surtourisme
* L’avion, c’est sûr !
L’Association Internationale du Transport Aérien a enregistré 37 millions de mouvements d’avions en 2023, soit une augmentation de 17 % par rapport à l’année précédente. Il n’y a eu AUCUN accident mortel en 2023 : à ce niveau de sécurité, une personne devrait en moyenne voyager en avion chaque jour pendant 103 239 ans pour être victime d’un accident mortel…
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